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photo header Association Loi 1901 d’aide aux personnes concernées par l’enchondromatose multiple et le syndrome de Maffucci

Prise en charge

La maladie d’Ollier

Par le Dr. Georges Finidori, chirurgien orthopédiste pédiatrique

La maladie d’Ollier fait partie des affections osseuses avec une prolifération tissulaire anormale à l’intérieur de l’os, en l’occurrence il s’agit d’un tissu cartilagineux. C’est une pathologie isolée, non familiale, constitutionnelle (on naît avec) due à des mutations somatiques.

Actuellement la prise en charge est essentiellement orthopédique.

Cette affection est généralement découverte après l’âge de 2-3 ans, souvent à cause d’une asymétrie des membres : inégalité de longueur, déviation axiale. Des tuméfactions des doigts, une fracture, des radios faites pour d’autres raisons peuvent aussi être révélatrices.

Le développement des chondromes induit une hétérogénéité dans la structure de l’os, des troubles de croissance et des incurvations squelettiques qui ont pour principale caractéristique d’être asymétriques.

Les chondromes se développent essentiellement sur les membres, les ceintures, en principe pas sur la colonne vertébrale et il est rare de devoir enlever des proliférations cartilagineuses sur le thorax.

Certains patients sont peu touchés et n’ont que quelques chondromes, en particulier aux mains, il existe cependant des formes sévères avec de très nombreux chondromes évolutifs.

La maladie de Kast-Maffucci est une forme particulière de la maladie d’Ollier associant aux chondromes des angiomes, elle est considérée comme plus sévère avec un risque oncologique plus important.

Le problème du diagnostic différentiel reste d’actualité. Plusieurs affections entraînant une prolifération tissulaire squelettique anormale peuvent donner des lésions radiologiquement proches de celles de la maladie d’Ollier, notamment la maladie exostosante, la dysplasie fibreuse.

Le diagnostic peut être fait par un médecin ayant l’habitude de ces pathologies. L’examen clinique et un bilan radiographique sont en général suffisants sans qu’il soit nécessaire de recourir à des investigations plus agressives (biopsie).

L’imagerie est donc très importante pour le diagnostic mais aussi pour la surveillance. Cependant il faut éviter de soumettre les personnes concernées à des doses d’irradiation trop importantes.

Il existe maintenant le système EOS, les images radiographiques sont obtenues avec une dose minime de rayons X. L’EOS n’a pas une excellente définition mais il permet d’obtenir des images du corps dans son intégralité et l’examen peut être sans risque reproduit si nécessaire pour la surveillance. La résonance magnétique (IRM) est surtout utilisée chez l’adulte pour voir si des chondromes sont redevenus actifs. La scintigraphie n’a pas vraiment de valeur, le scanner non plus, sauf pour certains bilans préopératoires.

Il est utile de bien archiver le dossier médical et radiologique (les moyens actuels informatiques permettent de classer et de conserver facilement les documents et d’éviter de les refaire faute de les avoir disponibles).

La surveillance au fil des années est très importante, elle repose sur les examens cliniques, l’imagerie, des photographies peuvent aussi être très utiles.

Surveillance chez l’enfant

Chez l’enfant on recommande une surveillance clinique régulière tous les ans avec des consultations orthopédiques, si possible auprès d’un centre de Référence et/ou de Compétence qui sont à même d’offrir une spécialisation utile puisqu’il s’agit d’une pathologie rare. Ils ne suppriment pas la nécessité d’une surveillance et de soins de proximité en essayant de coordonner au mieux l’ensemble des intervenants.

Il n’y a actuellement pas de traitement curatif mais seulement des soins essentiellement orthopédiques visant à traiter les complications évolutives de la maladie.

Les fractures ne sont pas exceptionnelles chez l’enfant, elles sont le plus souvent traitées par de simples immobilisations plâtrées. Il n’y a pas de troubles de la consolidation osseuse après fracture dans la maladie d’Ollier.

On peut avoir recours à des ostéotomies avec des ostéosynthèses, en particulier des enclouages centromédullaires pour des segments osseux déformés, fragilisés et parfois douloureux.

Pour les inégalités de longueur des membres inférieurs modérées (3 / 4 cm) on ralentit la croissance sur le membre plus long par épiphysiodèse vers la fin de la croissance. Quand les inégalités sont plus importantes, on peut pratiquer des allongements osseux. Les allongements sont relativement simples, l’os régénéré par l’allongement n’est pas chondromateux et le trouble de croissance ne concerne que le segment squelettique sans brièveté des autres tissus (peau, muscles, vaisseaux, nerfs…).

On peut corriger simultanément si nécessaire non seulement les inégalités de longueur mais les déviations axiales et les anomalies de rotation des membres.

Les chondromes des membres supérieurs peuvent induire des asymétries de croissance, en particulier des deux os de l’avant-bras avec une déviation du poignet et de la main qui peut s’associer à une luxation de la tête radiale au coude. Il faut corriger ces déformations antibrachiales assez tôt, avant la survenue d’une dislocation du coude, si possible.

Pour les chondromes des mains, il faut les opérer suffisamment tôt avant la survenue de déformations importantes et de limitations de mobilité des articulations des doigts. Les interventions sont simples, on évide les zones chondromateuses et on procède à un remodelage les phalanges.

Il est rare chez l’enfant d’être dans l’obligation de retirer de volumineux chondromes invalidants. Il existe pour ces interventions un risque hémorragique qui ne doit pas être sous-estimé.

Dans le syndrome de Maffucci, les angiomes n’apparaissent que vers la fin de la croissance. Il faut retirer les angiomes gênants, en particulier dans les zones d’appui aux pieds. Il n’est pas possible de tous les enlever et ils ont tendance à récidiver.

Finalement, pour l’enfant, on essaie d’arriver en fin de croissance avec un état fonctionnel optimal. Enfin, chez l’enfant, les transformations malignes sont très rares.

Les actes chirurgicaux ne semblent pas entraîner de risque évolutif sur les chondromes. Par contre, le traitement chez l’adulte d’une dégénérescence peut être compliqué par la présence d’un matériel d’ostéosynthèse.

Finalement, chez l’enfant, faute de pouvoir guérir la maladie et de retirer tous les chondromes, on reste modeste dans les actions chirurgicales en limitant le nombre des interventions.

Surveillance chez l’adulte

Chez l’adulte, la prise en charge est similaire à celle de l’enfant. Cependant, la tolérance à la chirurgie est plus difficile et les suites post-opératoires sont plus longues et plus compliquées.

Comme pour l’enfant, on corrige les déformations et les déviations des membres et on retire les chondromes volumineux et gênants.

La dégénérescence des chondromes est, semble t-il, plus fréquente dans le syndrome de Maffucci. Pour la maladie d’Ollier, il est difficile de donner une évaluation de la fréquence de survenue d’une tumeur maligne. L’important est d’établir une auto surveillance : toute modification d’un chondrome, douleurs d’apparition récente, augmentation de volume sont suspectes. La surveillance clinique et l’imagerie doivent permettre le dépistage précoce d’une évolution maligne et de pratiquer une chirurgie d’exérèse complète. Cette chirurgie carcinologique complétée par des traitements adjuvants si nécessaire (chimiothérapie, radiothérapie) ne peut être réalisée que dans des centres spécialisés.

On peut aussi recommander à l’âge adulte une surveillance oncologique, le risque de cancer en général paraissant un peu plus élevé que celui de la population générale.

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